Le 24 mars 1976, une junte militaire prenait le pouvoir en Argentine, renversant le gouvernement d’Isabel Perón pour instaurer une dictature qui allait se caractériser par un genre nouveau de répression : la "disparition" des opposants au régime, dans des centres de tortures clandestins disséminés dans Buenos Aires ou jetés du haut des avions dans la mer. C’est à la mémoire de ces "disparus" et sur la base des témoignages des personnes enfermées dans les centres clandestins de torture de Buenos Aires que sont consacrés les poèmes que publie Néstor Ponce en 2013 sous le titre Désapparences - Desapariencias-, illustrés par les dessins de Guillermo Núñez. La ville de Buenos Aires y est évoquée à la fois sous l’aspect d’une cartographie de l’horreur et du souvenir du bonheur. Balayant l’espace et le temps, ces poèmes s’adressent à toutes les générations de disparus dans une évocation qui est aussi celle d’un paradis perdu. La multiplicité des voix poétiques lutte ici contre l’oubli et "poétise le politique", tout en présentant l’image d’une ville qui dans sa relation violente au pouvoir ne cesse de manifester un désir effréné de liberté.